Bonjour Sitaël. Acceptes-tu de te livrer à notre interview sans tabou ?
Tu souris. Il a l’air heureux, cet imbécile. Tout excité à l’idée d’interviewer un Amérindien, un vrai. Pauvre petit Blanc tout naïf et stupide. Tu souris d’un air tout à fait charmant et acquiesces poliment.
« Avec plaisir ! »

• Pour quelles raisons as-tu décidé de vivre entouré de célébrités, ici à Miami ?
Ton sourire ne te quitte pas. Pourquoi es-tu venu ici ? Pour la villa de papa, bien sûr. Pour la richesse et les jolies (et jolis) Américain(e)s. Pour la plage, les conquêtes, l’aventure. Pour faire toutes les bêtises possibles, pour profiter de la vie. Les célébrités ? Tu ne les connais pas, tu n’as même jamais entendu parler d’elles.
« J’ai grandi avec des valeurs et une éducation différentes de celles des Américains, et j’ai donc développé des talents qu’ils n’ont pas, et n’auront d’ailleurs jamais. Je suis venu me mettre au service des agences de Miami. Mes animaux et moi-même leur serons très utiles, n’en doutez pas. »

• Maintenant, décris-nous un petit peu ton physique pour que nos auditeurs puissent en savoir plus. De quelle couleur sont tes cheveux ? Tes yeux ? Ta peau ?
La radio, ce n’est plus ce que c’était. Les gens ne savent plus rien s’imaginer – il faut qu’ils voient tout, comme à la télé. Tu laisses échapper un léger rire, un rire mauvais et moqueur, mais qui paraît si charmant aux oreilles de l’animateur. Tu te penches légèrement en avant, les coudes sur la table, le menton posé sur tes mains jointes. Tes longs cheveux noirs dont tu es si fier glissent sur ton visage, en masquant presque la moitié. Tes yeux en amande, d’un brun virant sur le doré, fixent ton interlocuteur avec une lueur tentatrice. Tes fines lèvres, absolument parfaites à ton goût, esquissent ce fameux sourire en coin qui ne te quitte presque jamais. Tes traits sont typiquement amérindiens, ainsi que ta stature toute en finesse et ta peau tannée par le soleil de la Floride. Aux côtés de tes frères indiens, tu es d’une banalité flagrante. Mais ici, tu fais tache. Véritable concentration d’exotisme, ton pouvoir d’attraction est indéniable. Fier de ta sublime apparence, tu laisses ta voix suave répondre d’un ton faussement modeste.
« Laissons planer le mystère, voulez-vous ? ~ »

• De ce fait, quel est ton style vestimentaire ?
Il insiste, le bougre. Tu ris une nouvelle fois, mais acceptes de répondre.
« Je suis très simple, vous savez. Un tee-shirt, un jean, et me voilà heureux. »
Mais quelle hypocrisie ! Un tee-shirt, un jean, certes. Mais un tee-shirt noir, qui comporte toujours des inscriptions blanches à l’arrière. Des trucs débiles et narcissiques, du genre ‘Devil Inside’, ‘Don’t Mess with the Best’, ‘Long Hair Don’t Care’ et compagnie… Et le jean, toujours sombre, moulant à souhait. Parfois remplacé par un pantalon en cuir, tout ça mettant très bien en valeur ton royal et parfait fessier. Sans oublier les bottes noires à clous, genre motard-bad-boy-rebelle-super-trop-smexy…

• As-tu un signe particulier que tu voudrais faire partager avec nous ?
Comme si tu voulais faire partager quoi que ce soit à la base…
« Eh bien, il se pourrait que j’aie quelques tatouages traditionnels quelque part… »
A vous de le découvrir, as-tu l’air de sous-entendre. ‘Spèce de dégueulasse.

• Dis-moi quelles sont tes qualités, au moins 6.
Ah, les qualités. Voilà un sujet qui te ferait presque sourire sincèrement. Et, en effet, tes lèvres s’étirent pour laisser scintiller tes dents étonnamment blanches.
« Je suppose que grâce à mon éducation amérindienne, j’ai acquis des qualités que vous autres Américains n’avez pas. Ainsi, je suis travailleur, débrouillard, déterminé, perfectionniste, fier, éloquent, et très intelligent. Et j’aime les animaux. »
Tu pourrais continuer ainsi pendant des heures, mais bon, il ne t’a demandé que six qualités… Et tes attributs physiques n’en font certainement pas partie.

• Et tes défauts, tu en as forcément : 6 au minimum !
Ton rire mesquin s’élève à nouveau.
« Des défauts ? Je ne pense pas, non. »
Cette fois, c’est moi qui pourrais les décrire pendant des heures. Hypocrite, orgueilleux, te sentant toujours supérieur aux autres. Odieux, moqueur, trop intelligent pour considérer le commun des mortels comme ton égal, ne faisant jamais confiance à personne. Dominateur, fils à papa, exigeant, et j’en passe…

• Nous connaissons presque tout de toi ! Peux-tu nous en dire plus concernant tes hobbys et passe-temps ?
« Eh bien, je consacre tout mon temps à mes animaux. Il faut bien que quelqu’un s’en occupe, et je suis le seul apte à le faire. C’était déjà là mon passe-temps quand j’étais enfant, et je suis heureux d’en avoir fait mon métier. »
Bien sûr, tu ne vas pas lui dire que tu adores faire la fête et que tu affectionnes la boisson, le sport de chambre et les jeux plus que de raison…

• Au fait, tu as des habitudes  ? Bonnes ou mauvaises, c'est pas grave si elles sont mauvaises, héhé~.
Des habitudes… mauvaises ? Mais voyons, regardez-le ! Sitaël est un ange, tout le monde le sait. Tu souris encore, terriblement amusé par l’ironie de la situation.
« Je veux tout apprendre de votre culture. Du coup, il m’arrive de sortir souvent pour essayer de tout voir – je peux même passer des heures en bibliothèque ! »
Quel beau mensonge que voilà… En vrai, tes habitudes, c'est de sortir avec un aigle sur l'épaule pour te la péter.

• Raconte-nous un peu ton histoire et quels sont tes objectifs dans la vie !
« Vous savez, je n’ai pas grand-chose à raconter. Je viens de la réserve indienne de Brighton, et j’ai eu envie de voir le monde du dehors. Je sais que j’ai une place à Miami : vos chères stars ont besoin de quelqu’un comme moi. Les mannequins pourront poser avec mes fauves, mes loups et mes rapaces. Les chanteurs, eux, apprécieront toujours un lâché de colombes après leurs concerts. En fait, tout le monde peut trouver son compte avec moi, et j’ai bien l’intention de satisfaire chaque agence. »
Pour une fois, tu ne mens pas tant que ça. Tu omets juste quelques détails, du genre : je suis le fils unique d’un des chefs de la réserve – qui est aussi un des propriétaires du casino qui fait notre réputation –, je suis donc plein aux as, et je crèche dans l’énorme villa de papa où j’ai installé ma ménagerie. Surdoué, je sais parler les deux langues indiennes de la réserve, en plus de l'anglais indispensable pour les employés du casino (où je n'ai jamais travaillé vu qu'en fait, je n'ai jamais travaillé tout court). Fatalement, j’ai grandi dans un univers de stupre, d’alcool et de jeux d’argent. Ce qui explique sans mal comment je suis devenu le charmant jeune homme que vous voyez…